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Publié le 29 Mars 2024

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Rédigé par RMAC

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Publié le 18 Mars 2024

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Publié le 1 Octobre 2021

Adhésion annuelle 2021
Lecture(S)...  Relire "L'ami anglais"

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Publié le 17 Septembre 2021

Adhésion annuelle 2021
Lecture(S)...  Misère de la Kabylie

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Publié le 5 Septembre 2021

Adhésion annuelle 2021
Camus en cyrillique

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Publié le 26 Août 2021

Adhésion annuelle 2021

Un passeur venu de loin

par Fawaz Hussain

Ma découverte du nom d’Albert Camus, dans sa version arabe Albîr Camou ou kurde Albêr Camo, remonte aux années 70 du siècle dernier. Élève de l’unique lycée d’Amouda ma ville, je vivais encore sur les terres familiales kurdes de la Mésopotamie, dans le nord-est de la Syrie. J’ignorais alors tout de ce qui m’attendait en Europe et de l’influence que cet écrivain né en Algérie exercerait sur moi. Les Français, qui avec les Anglais avaient dessiné l’actuelle carte du Moyen-Orient sur les décombre de l’Empire ottoman, s’étaient retirés depuis 1946. Ils avaient cédé la place à une toute jeune République syrienne, que l’étonnante mosaïque ethnique et religieuse du pays n’empêchait pas de pousser ses premiers vagissements panarabistes et de vouer déjà une haine tenace au Kurde et à sa langue indo-européenne.

Cette région du monde que les manuels scolaires présentent comme le berceau de l’humanité, l’endroit où fut cultivé le premier blé et inventée l’écriture cunéiforme, était en cette deuxième moitié du xxe siècle fort redevable à Beyrouth : la capitale libanaise constituait une véritable fenêtre donnant sur l’Europe occidentale, sur l’Union soviétique de l’époque et même sur les lointaines Amériques. Toute la littérature étrangère transitait par ses éditeurs et ses traducteurs et finissait par nous parvenir, à nous les Kurdes vivant dans un trou oublié du monde entre Tigre et Euphrate. La télévision n’avait pas encore vu le jour chez nous et, en l’absence de tout divertissement, je dévorais les romans, unique moyen que j’avais trouvé pour m’évader loin d’une terre que condamnaient toutes les frustrations. De toute évidence, je ne pouvais pas rater Al-Gharib et Al-Tdha’oun d’Albert Camus, avant de découvrir l’Étranger et la Peste dans leur version d’origine à l’université d’Alep entre 1973 et 1977.

Ma licence de littérature française en poche et à la main un passeport arabe délivré en Syrie, lequel portait mention d’un visa long séjour, j’atterris le 20 août 1978 à Paris afin d’y poursuivre mes études supérieures. Albert Camus a été tué le 4 janvier 1960 dans un accident de voiture, mais sa pensée, comme celle de Jean-Paul Sartre, flottait sur un Saint-Germain-des-Prés que je fréquentais assidûment, bien plus pour ses restaurants universitaires à bon marché que pour ses brasseries de luxe comme les Deux-Magots ou le Flore. Après ma thèse soutenue en 1988, l’écrivain qui sommeillait en moi voulait enfin s’exprimer, mais en quelle langue ? J’éliminais d’emblée l’arabe, qui avait opprimé ma langue maternelle, et mon choix s’arrêta sur le français. Mon kurde, en piteux état du fait de sa mise à l’index, demandait un travail de fond, mais moyennant quels supports ? Les livres kurdes étaient encore rares et les quelques glossaires qui nous servaient de dictionnaires comportaient énormément de lacunes, c’était très frustrant. Il me fallait prendre mon mal en patience si je voulais attendre que nous autres Kurdes puissions lire les chefs-d’œuvre de la littérature universelle dans notre langue maternelle et non en turc, en arabe ou en persan.

Sur la fin de 1992, je m’installai à Stockholm et là, dans le froid et la neige de la Suède, je découvris une communauté kurde venue des quatre parties du Kurdistan, en particulier des Kurdes de Turquie qui avait fui le coup d’État militaire de 1980. Grâce à eux, j’ai beaucoup travaillé mon vocabulaire et j’ai gagné en assurance, non pas pour écrire en kurde, mais pour traduire en cette langue. Deux ans après mon arrivée, j’obtenais un poste de chargé de cours en Laponie, tout au nord du pays et, ô surprise, nous avions le Petit prince d’Antoine de Saint-Exupéry et l’Étranger de Camus au programme de la première année. Je me mis à les traduire, mais autant l’auteur du Petit prince m’avait posé relativement peu de problèmes, autant je rencontrai avec Camus des difficultés sérieuses, notamment dans la deuxième partie de son Étranger, quand Meursault, après le meurtre de l’arabe, passe ses jours entre sa cellule et la salle d’audience. Si le kurde comporte un lexique riche de centaines d’unités relatives aux moutons et au cycle des saisons, c’est une langue extrêmement pauvre en termes juridiques, comme avocat, barreau, bâtonnier, cour pénale, greffe, huissier, plaidoirie, renvoi ou voie de recours… Je passais des heures à appeler mes amis à Stockholm, et chacun me donnait les termes utilisés en Turquie, en Irak ou en Iran. Ce fut une expérience très enrichissante et, comme le Petit Prince, le roman de Camus, rebaptisé pour la traduction Biyanî, sortit à Stockholm, aux éditions Nûdem, en 1995.

Après mon retour à Paris en l’an 2000, je remis sur le métier ce Biyanî, qui vit le jour en 2012, en version améliorée, à Istanbul, aux éditions Avesta. Je suis content d’être le premier Kurde à avoir traduit dans ma langue maternelle ces deux titres du patrimoine culturel de l’humanité.  Combien ma tâche eût été facilitée si le premier dictionnaire kurde-français avait alors existé, celui-là même que l’on doit à l’Institut kurde de Paris, et qui comble enfin cette lacune. Je devrais me remettre à la Peste dont j’ai entrepris la traduction il y a quelques années.

Et voici l’incipit de ma traduction de l’Étranger en kurde.

Îro dayê mir. Belkî jî doh bû. Ez nizainim. Ji mala pîran ji min re telegrafek hat : « Dê candayî. Veşartin sibehê. Silavên bijarte » Mane û wateya vê yekê tune. Ew belkî do bû.

Mala pîran li Morengoyê, heştê kîlometran dûrî serbajarê Cezayirê, ye. Ez ê saet diduyan li otobusê siwar bin û piştî nîvro bigihîjim wê. Ez ê weha jî bikarim şevê li ber lâşe diya xwe bimînim û sibehê êvarê vegerim malê.

 

Fawaz HUSSAIN

Fawaz Hussain est écrivain kurde de langue française et traducteur.

   Né en 1953, dans le Nord-Est de la Syrie, Fawaz Hussain vit à Paris et enseigne le français aux étrangers à la Mairie de Paris et aux lycéens en Seine-Saint-Denis.

   Il est l’auteur de plusieurs ouvrages : Les sables de Mésopotamie, Le rêveur des bords du Tigre, Le Kurde qui regardait passer les nuages … C’est grâce à   Murcie, sur les pas d’Ibn’Arabie que j’ai fait sa connaissance.     

   J'ai détecté dans ce roman quelques sensibilités camusiennes. J'ai cherché à en savoir plus sur lui et j’ai découvert qu'il avait traduit L’Étranger en Kurde

Fawaz Hussain sera présent aux 38e Journées Internationales de Lourmarin les 21-22-23 octobre 2021 pour nous présenter "En quoi L'Homme Révolté aide-t-il un Kurde à réfléchir sur le sentiment de révolte ?" Venez nombreux

Michèle Stubbe-Robinet

Fawaz Hussain

Fawaz Hussain

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