Publié le 26 Mai 2020

 

   

 

Relire Les Justes, 

 

Dans sa préface Camus explique « Si extraordinaires que puissent paraître, en effet, certaines des situations de cette pièce, elles sont pourtant historiques. Ceci   ne veut pas dire, on verra d’ailleurs, que Les Justes soient une pièce historique. Mais tous les personnages ont réellement existé et se sont conduits comme je le dis. J’ai seulement tâché à rendre vraisemblable ce qui était déjà. »

 

C’est bien la dramatisation événements historiques qui se sont déroulés en Russie qui sont au cœur de cette tragédie : l’attentat perpétré contre  le grand-duc  Serge Alexandrovitch, le 17 février 1905 à Moscou par le poète  socialiste révolutionnaire Ivan Platonovitch Kaliaïev, membre du parti des Combattants socialistes révolutionnaires.

 

Plusieurs pistes de réflexion et de recherche après cette lecture.

J’ai voulu, dans un premier temps, retrouver les acteurs historiques, les comparer avec les personnages de la fiction théâtrale et voir, de plus près, les sources nombreuses sur lesquelles s’est appuyé Camus pour composer cette pièce :

Dostoïevski, bien sûr, mais aussi Rousseau, les souvenirs de l’écrivain révolutionnaire Boris Savinkov, traduits par Nicolas Ivanovich Lazarevitch, ami de Camus, qui lui apporte, sur cette époque, ses connaissances personnelles,  -

les écrits et témoignages, entre autres, des philosophes Nicolaï Tchernischevski et Mikhaïl Aleksandrovitch Bakounine, de l’activiste Sergueï Guennadievitch Netchaïev, du nihiliste Dimitri Ivanovitch Pissarev, du sociologue Nikolaï Konstantinovitch Mikhaïlovski …

 

Les Carnets II (1945-1948, notamment pages 222 et suivantes NRF Gallimard Edition 1964) foisonnent d’informations collectées au fur et à mesure de ses investigations, d’idées pour la future rédaction.

 

Je me suis intéressée, plus particulièrement à Ivan Platonovitch Kaliaïev, qui commit l’attentat mortel contre le grand-duc, et j’ai tenté de faire le parallèle avec le héros de la pièce, qui partage avec Romeo quelques caractéristiques, il en a la jeunesse, le charme, l’ardeur et l’impatience.
 Mais moi, j’ai eu un faible pour le jeune Alexis Voinov, lui aussi est idéaliste, fervent mais il doute, il a peur, il est tellement humain !

 

Et puis, un des aspects que développe Camus dans cette pièce explique clairement cette phrase qu’il prononcera plus tard à Stockholm et qui fera tant polémique car extraite de son contexte, déformée et raccourcie ! « Je crois à la Justice, mais je défendrai ma mère avant la Justice » et voici la version originelle « En ce moment, on lance des bombes dans les tramways d’Alger. Ma mère peut se trouver dans un de ses tramways. Si c’est cela, la justice, je préfère ma mère ».

 

Et enfin, j’ai retrouvé Maria Casarès interprétant, plutôt incarnant magistralement Dora avec tant de réalisme et de conviction !  Et j’ai relu avec émotion le courrier qu’elle adressa à Camus le jour de la dernière représentation (cette lettre figure dans la correspondance Camus/Casarès page 641) « Ce soir, ce sera l’heure de la mélancolie. La dernière représentation des Justes. Hier déjà j’en ai senti la nostalgie tout le long du cinquième acte ; aujourd’hui ce sera difficile. Trop de choses ont marqué cette pièce et c’est la première fois que j’aurais à pleurer une « dernière », seule. »

 

De nombreuses lettres -72 échangées entre Camus et Maria Casarès - évoquent Les Justes.

ADC

 

 

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Publié le 13 Mai 2020

Albert Camus, Correspondance avec ses amis Bénisti (1934-1958)

Edition dirigée par Jean-Pierre Bénisti et Martine Mathieu-Job, présenté par Virginie Lupo et Guy Basset, Bleu autour,  2019.

 

 

Quelques cinquante lettres de Camus conservées par la famille Bénisti sont rassemblées dans cet ouvrage, malheureusement, de nombreuses missives adressées à Camus par les Bénisti ont été perdues au fil des multiples déménagements de l’écrivain. Ces correspondances sont aussi des dialogues d’artistes engagés évoquant leurs doutes, leurs difficultés… elles sont aussi des

encouragements réciproques.


Cette correspondance vient illustrer certains pans moins connus de la vie de Camus, et enrichir, avec beaucoup d’émotion, nos connaissances.

 

4ème de couverture :

« Voici une cinquantaine de lettres d'Albert Camus à des proches d'Alger rencontrés quand il avait vingt ans : le sculpteur et peintre Louis Bénisti (1903-1995), son frère Lucien et leurs épouses respectives. Aux lettres et fac-similés sont associés, comme autant de traces d'un univers sensible et partagé, des reproductions d'œuvres de Louis Bénisti, de photographies et d'autres documents.
A la faveur de ce dialogue amical, intellectuel et artistique, Camus exprime son idée et sa pédagogie de la philosophie ou ses exigences et scrupules d'éditeur. Surtout, il se livre en toute confiance et simplicité. Confronté à la maladie et aux difficultés de sa vie affective, il aborde la carrière littéraire à la fois inquiet et empli d'espoir, jusqu'à l'arrivée du tourbillon de la célébrité. Exceptionnelle par la précocité et la longévité des amitiés qui la fondent, cette correspondance inédite affine notre vision de l'écrivain. Elle éclaire aussi l'effervescence créatrice d'une jeune génération dans l'Algérie des années 1930. »

 

Un article plus détaillé dans le prochain Echo des Rencontres n°18 - juin 2020.

 

Michèle

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Rédigé par RMAC

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Publié le 6 Mai 2020

 

Mon cher Albert, Lettres à Albert Camus,

Abel Paul Pitous, Gallimard, 2013.

 

Un récit sous la forme d'une longue lettre, une missive datée de 1971, probablement amendée plus tard, écrite à Marseille, signée "Paupol", adressée à Albert. 


Abel Paul Pitous convoque ses souvenirs, ceux qu'il entend partager avec son voisin - tous deux résidaient rue de Lyon, à Belcourt, à Alger-, à son camarade d'école - celle de la rue Aumerat -, à son copain de jeux de rue, à son coéquipier de foot, à son cher ami d'enfance, celui qu'il perdra un peu de vue quand ils poursuivront des études différentes, le lycée pour Albert, l'Ecole primaire supérieur pour Paupol.
Ils continueront, néanmoins, à se fréquenter grâce à leur amour commun du foot. Pourtant, en 1931, ils se quitteront définitivement, la vie étant ainsi...

Après une visite sur la tombe de son ami, à Lourmarin, il ressent le besoin impérieux de transcrire ce passé heureux. Il s'attache longuement, avec émotion et un plaisir nostalgique, à évoquer les souvenirs, ceux liés au foot, les multiples stades fréquentés, les matchs, les championnats, les équipes, le RUA, bien sûr, les scores...
Puis il revient sur cette fameuse photo où Camus pose en gardien de but entouré de son équipe, non pas celle du Rua (Racing universitaire Algérois) comme on le croit trop souvent, mais celle de l'Ecole pratique d'industrie. 
Abel Paul, grand sourire, se trouve à sa gauche.


C'est joliment écrit, un texte remanié par un tiers, par un correcteur de Gallimard ? Peut-être, pas sûr.
En tout cas, les souvenirs ressuscités sont émouvants, savoureux, bien réels, authentiques car corroborés par d'autres sources, d'autres témoignages.

 

 G.Lemettre   

Lecture(S)... Mon cher Albert, Lettres à Albert Camus

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Rédigé par RMAC

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